Henry, portrait d'un serial killer : Critique et test DVD


Le 8 Avril 2014, Filmédia se fendra de nouvelles éditions d' «Henry, portrait d'un serial killer». Au menu , un nouveau master haute définition, des éditions double DVD collector et Bluray, un monstre humain avec près de 200 homicides au compteur et le destin curieux d'une non moins curieuse péloche appelée à devenir culte. Ecranbis.com livre son aussi printanier que sanglant review !

Si nous ne sommes en général pas les derniers à nous réjouir des ressorties de classiques du cinéma de genre sur la galette bleutée, je me dois aussi d' avouer que ces retours de boomerang, aussi HD soient-ils, finissent par nous (chroniqueurs, observateurs et autres bêtes à plumes) abandonner dans une forme de  stupeur voire d' embarras. Oui, messieurs, dames, de quoi avons nous l'air, nous et nos chroniques retardataires? Des crocheteurs de serrures déjà forcées ? Puisque au fond tout a déjà été dit , redit , écrit , réécrit, il faut , courbant l'échine, pénétrer en s'excusant dans ces œuvres cathédrales, multiplier les révérences et courbettes, jusqu'à l'épuisement, de peur de passer pour un infâme et suffisant personnage, ré-inventeur de roue à temps perdu, ayant discerné vingt ou trente années après la guerre dans le magma pelliculaire de la création une forme qui aurait échappé à tous et à toutes.



Je tenterai donc ici de ne pas rejoindre le camp de ceux qui, plus souvent pour faire les intéressants que par sincérité, finissent par voir dans un film plus que le réalisateur n'a bien voulu y mettre. Disons non à l'ivresse verbale de la critique tardive, comme nous disons non à l'hypersémentisation du psychanalyste de comptoirs ! Ma gène déballée avec la sincérité que Christine Taubira n'a visiblement plus, je me livre aux lions et aux lecteurs. Il est évidemment impossible de parler du film de John McNaughton sans, d'une part, évoquer un double parcours, celui d' Henry Lee Lucas, sa créature létale et le chemin sinueux qui conduira le film à entrer dans l'histoire du cinéma et au panthéon du culte.

Henry Lee Lucas, puisqu'il faut bien commencer par quelque chose, est unanimement considéré comme l'un des tueurs en série les plus monstrueux que l'humanité n'ait jamais enfantée. Pas question de discuter l'appellation, la formule, d'instaurer je ne sais quel argus du macabre et de l'horreur. 360 homicides selon l'organisateur, 199 selon les autorités, un « score » qui le conduira derrière les barreaux en 1983 puis dans les couloirs de la mort avant que son exécution soit commutée en une peine d’incarcération à vie. La faucheuse viendra finalement jusque dans sa cellule lui arracher le dernier souffle au début de ce millénaire. Le cinéma américain, entre catharsis et sensationnalisme, indignation et voyeurisme morbide (voir nos chroniques de The Strangler et Le Tueur de Boston) n'a pas attendu la mort de la bête pour en vendre la peau.



Henry: Portrait of a Serial Killer est tourné en 1985, deux ans seulement après l'arrestation d'Henry Lee Lucas. Le budget est dérisoire, on murmure la somme de 110 000 dollars américains, initialement destinés à la production d'un documentaire sur le catch (projet abandonné pour de sombre raison de négociation de droits d'images d'archive). Le film est emballé en 28 jours en 16 mm et l'on annonce sa sortie pour l'année suivante. C'était sans compter sur la censure américaine qui dégaine un classement X et il faudra quatre années de plus pour que la bobine parvienne à se frayer un chemin jusqu'aux écrans. Chienne de vie ! 



Immanquablement , une telle genèse, un tel rapport à la censure attise une certaine curiosité chez le cinéphile et plus généralement chez le spectateur. Quel est donc ce sein que l'on nous empêche de voir ? Et voilà sans doute la grande force de l’œuvre de John McNaughton. Henry: Portrait of a Serial Killer n'est pas le film auquel on s'attend mais un quasi documentaire. “Quasi” j'insiste sur le terme puisque nous sommes face à une adaptation distante ou libre, pourrions nous dire, des sombres exploits de Lucas. Donc à une œuvre de fiction prenant la forme d'une œuvre documentaire. Au delà du procédé, (et même du jeu de mot) dans Henry, ce qui frappe c'est la brutalité de l'exercice. Une brutalité qui tourne le dos à une expression graphique mais aussi, voire surtout, à toute forme d'introspection. 



En résulte un voyage inexpliqué, gratuit froid, glauque dans la banalité d'une existence vouée à la mise à mort. Et voilà bien ce qui explique l'immense popularité du film de Mc Naugthon auprès des amateurs de genre, c'est une œuvre qui effraie sans artifice fantastique, sans mise en scène, sans sombre ou machiavélique dessein ... par la simple exploration fonctionnelle d'un esprit illogique et malade. Le concept du monstre humain... Si nous ne ne touchons pas ici un quasi euphémisme. En ce, Henry constitue sans aucun doute possible un sorte d'anti slasher.

J'assume donc la banalité de la déclaration , Henry: Portrait of a Serial Killer est un grand film. Un grand film qui n'a malheureusement pas suffi à lancer la carrière de son géniteur même si notre homme s'est quelques années plus tard fendu d'un des plus brillants thrillers des années90: Wild Things ( Sex crimes).



Le disque :

Henry nous revient dans une riche édition double disque proposant le film dans un nouveau master haute définition au format 1.33 4/3 accompagné de mixages français et anglais (sous titres français disponibles). Côté suppléments :
-Le making of (52 minutes)
-Interview de John McNaughton (34 mn)
-Conversation entre McNaughton et le critique Nigel Floyd (22 minutes)
-Le film censuré en Grande Bretagne (15mn)
-Le Story Board
-Henry Lee Lucas,  serial killer (28 minutes)
-Interview de Stéphane Bourgoin (30 minutes)
-Stépĥane bourgoin face à Ottis Toole (7 linutes)
- Les biographies