Contronatura : Critique et test DVD


Deuxième cartouche du mois chez Artus...Contronatura, bout de péloche perdu dans la filmographie d'Antonio Margheriti, bobinette obscure dont je n'avais, il faut bien l'avouer, jamais entendu parler. Nouvelle preuve d'une cinéphilie déficiente dont je m'empresse de m'excuser, à genoux, accroché à vos jambes, pleurant toutes les larmes de mon corps, comme une gourde venant de perdre son premier chéri... Contrenatura, rien que le titre donne envie,ou plutôt insinue,  interroge, questionne.. Quel acte contre nature et inqualifiable peut-il bien justifier pareil titrage ? De quoi allons nous donc être les témoins ? Mon éducation judéo-chrétienne pourra t-elle me permettre de voir le film jusqu'au bout ?


"le «contre nature» de la belle année 69 a quelque peu perdu de sa substance scandaleuse et sulfureuse. Mais comment, mon cher Antonio, aurais-tu pu prévoir qu'en 2016, nous en serions à la femme à barbe ?"


 Laissez vos cassettes de « Caligula II» sur l'étagère et ne me parlez pas de la prime tentative de (co) réalisation du George Eastman, Je vous demande de vous arrêter, aurait dit Édouard Baladur...Car ici, l'innommable tient de l’effleurement, du bisous fuyant, de la tentative de tétée. De colombes en plein vol... comme le chantait avec pudeur Ana Torraja ...D'ailleurs en matière de vol, d'oiseaux voyageurs et de «Mecano» fiscal la petite en connaissait un rayon. Elle fut quelques années plus tard condamnée par le tribunal de Palma de Majorque pour fraude et détournement de fond à travers des sociétés écrans. Une fois de plus je m'égare. Je disais ou plutôt j'écrivais donc, que le «contre nature» de la belle année 69 avait quelque peu perdu de sa substance scandaleuse et sulfureuse. Mais comment, mon cher Antonio, aurais-tu pu prévoir qu'en 2016, nous en serions à la femme à barbe ? Hein ? Je te le demande ?

"Contronatura célèbre d'une main la justice divine...de l'autre,  l'affrontement des classes"



Deux femmes, 3 hommes et un chauffeur tentent de trouver leur chemin sous une pluie battante... L'automobile embourbée, on convient de trouver refuge dans une bicoque aperçue quelques centaines de mètres plus tôt. Sur place les attendent une vielle femme et son fils en pleine séance de spiritisme. Invités à prendre part à cette tentative de communication avec l'au delà, les naufragés vont voir leur petits secrets refaire surface et en payer le prix... Finalement très moraliste dans le propos, Contronatura célèbre d'une main la justice divine, naturelle, cette fameuse roue qui tourne, entre fatalité fantasmé et croyance niaise. Le pendant laïque de "Tu ne l'emporteras pas au paradis"... Vous avez-je dis à quelle point l'athéisme peut se parer de superstitions, voire d'une certaine forme de religiosité ?  De l'autre, elle caresse l'affrontement des classes, la revanche du petit peuple, victime forcement innocente sur la bourgeoisie aussi dominatrice que coupable.

"la photo, même si la copie ne lui rend pas toujours justice, est le plus souvent sublime." 



Pour que la boisson est un peu de goût (doux ?), deux chattes oisives font des cochonneries à l'étage...Après tout la culpabilité est un passe temps comme un autre. Margheriti oblige, il y aura des maquettes (enfin une) et de bien belles images. Oui la photo, même si la copie ne lui rend pas toujours justice, est le plus souvent sublime. Contronatura ravit par conséquent les yeux plus qu'il ne nourrit l'esprit. Le rythme lent ou langoureux (selon que l'on apprécie la valse ) paye c'est vrai le prix d'un récit construit sur d'incessants flashback. Et alors ? Il n'est pas interdit de prendre son temps, on est pas chez Michael Bay, que je sache ?


Bien que pas vraiment gothique (quoique ça de discute), ce  "Contronatura» mérite cette édition inattendue et pourrait même bien séduire ceux qui ne voient en Margheriti qu'un faiseur sans génie. C'est dire !


Un œil sur le disque :
La copie a le mérite d'exister et de proposer le film dans son scope d'origine. Pas de doublage français (le film étant resté inédit dans l'hexagone) mais des pistes italiennes et allemande, ainsi que des sous titres dans la langue de Cyril Hanouna (ça change un peu de Molière, beaucoup même). Dans les bonus, un diaporama, des films annonces et l'indispensable présentation amoureuse du film par Alain Petit. Très recommandable