Puppet Master : Critique et test DVD (Import)



Tous les sales gosses des sacro-saintes 80's ont-il rêvé d'être un jour Charles Band? D'inonder la presse spécialisée et les linéaires de vidéoclubs de visuels plus improbables les uns que les autres? Prince de la jaquette aguicheuse, du pitch fou et du budget restreint, le réalisateur-scénariste-producteur a, qu'on le veuille ou non, écrit quelques-unes des plus belles pages du cinéma bis. Créatures extraterrestres à la recherche de terriennes à féconder, émission Télé venue d'outre espace captées grâce à une antenne satellite, adolescent trouvant dans le désert une arme alien... Rien n'est trop fou pour Band. Mais Charlie voit plus haut, trop haut peut être. Lorsqu'il  rachète les studios Dino de Laurentiis à Rome en Italie, annonce la mise en chantier de 50 longs métrages pour l'année 87, évoque les 10 millions de Dollars de budget de Decapitron (projet avorté), il creuse déjà la tombe de sa machine à rêve. Quand son «Empire» s'effondre en plein tournage de l'ambitieux Robojox de Stuart Gordon, notre capitaine n'entend pas suivre la carcasse broyée de son vaisseau dans les profondeurs abyssale de la création... Un radeau est largué à la mer, sous la pleine lune...



L'empire est tombé, pas l'empereur. A la fin des années 80, Charles repart du bon pied avec «Full Moon» et entend appliquer la méthode «Band». Comprendre : continuer à produire à l'économie pour alimenter le pipeline de la vidéo. Il signe un deal avec Paramount et Pionner pour la distribution  de ses efforts sur le territoire américain et se relance, cheveux au vent, cœur battant à l'assaut de l'imaginaire populaire. Les budgets seront restreints mais les idées au moins aussi folles. Ainsi va naître une incroyable saga accrochée au destin d'un mystérieux personnage: André Toulon. Un univers plongeant ses tentacules dans les succès passés d'Empire Pictures. Petits, vicieux, méchants! Impossible de ne pas voir dans les poupées tueuses de «Puppet Master» les héritiers des petits démons invoqués par magie noire dans le Ghoulies de Luca Bercovici. Le premier film distribué par Empire (Initialement titré Beasties) qui se classa dans le top 15 des meilleurs locations suite au succès en salle de Gremlins (Joe Dante). On pense aussi à l'excellent «Dolls». Un autre enfant d'Empire Pictures confié à Stuart Gordon à la suite de Ré-animator et From Beyond. La thématique du jouet maléfique en plus...



Certes les  poupées et marionnettes tueuses n'ont pas attendu la série des Puppet Masters pour envahir les écrans. La terrifiante perspective de voir un  simple jouet prendre vie pour donner la mort est même un thème très usité sur la planète fantastique. Mais lorsque Puppet Master sort en VHS aux États Unis, le sujet vient d'être remis à la mode et au goût du jour par "Jeux enfants" dans lequel Tom Holland lâche un poupon du genre coriace : Chucky. Puppet Master sera donc la première production «Full moon» et même si la chose ne connût pas l'honneur des salles obscures, un premier succès pour le producteur. Il lui donnera pas moins de 9 suites et il y a fort à parier que l'histoire ne s'arrêtera pas là.

L'autre homme de Puppet Master c'est bien entendu David Schmoeller. Il débute en pleine slashermania avec une production Band : Tourist Trap (le Piège). Sous la bannière Empire, il réalise Crawlspace ("Fou à tuer" en France) avec Klaus Kinski et Catacombs. Sous celle de Full moon, il signe notre péloche du jour et Netherworld. Une histoire d'amitié?  Dans un interview qu'il donne en 1986 à William Rabkin (Publié dans l'écran fantastique au mois de Mai), Band déclare «David Schmoeller vient de décliner plusieurs offres venant de l'extérieur pour faire deux films chez nous, je ne sais pas combien ont lui a proposé, peut être pas beaucoup plus que ce que nous lui donnons mais toujours est-il que l'expérience qu'il a vécu a dû être assez bonne pour qu'il ait envie de la réitérer».



Si l'on mesure la qualité d'un monstre ou d'une créature à la façon dont il s'installe dans l'imaginaire de collectif, voire mieux, la culture pop, les personnages de bois créés par le regretté David Allen (un fidèle d'Empire et de Full Moon) sont indiscutablement une réussite. Blade, un tueur blanchâtre et Klaus Kinkiesque sous imperméable, Pinhead, un colosse à tête réduite, Jester et sa tête rotative, Leech Woman, une Barbie brune cracheuse de sangsues, Tuneler une sorte de Laurent Fabius à crâne foreur... Ces premières poupées (d'autres viendront dans les épisodes suivants) expliquent pratiquement à elles seules le succès du film de  David Schmoeller. D'autant plus que les effets visuels alternants animation image par image, animatronique et marionnettes plus classiques (pour Pinhead par exemple) sont juste superbes. Puppet Master n'est  pourtant pas qu'un basique «Creature feature», mais au s'entiche au contraire d'un récit plutôt torturé.



En 1939, Baie de Bodega (Californie), un luxueux palace surplombant l'océan pacifique... Dans l'une de ses chambres, un vieil homme met la dernière touche à l'une de ses nouvelles créations. Non, André Toulon n'est pas un fabriquant de poupées comme les autres. Il a insufflé la vie à chacune de ses marionnettes. Mais ce jour là pour échapper à deux agents nazis, c'est avec la mort que Toulon a rendez vous. Il se suicide d'une balle dans la tête avant d'être capturé.  Cinquante années plus tard, Alex, dont les rêves sont parait-il prémonitoires, et une équipe de médiums se retrouvent dans ce même hôtel. Ils devront enquêter sur un certain Neil Gallagher qui pourrait avoir découvert le secret de Toulon avant de se donner lui même la mort. Mais dans les suites, étages, et salons de la vieille bâtisse, la mort menace... Les poupées n'ont de toute évidence pas disparues avec leur créateur.



Des origines du secret de Toulon, de ses motivations, nous ne saurons donc pas grand chose (pour le moment) et Puppet Master premier du nom donne même parfois l'impression de prendre un train en route. Mais plus étonnant encore est le traitement choisi par Schmoeller. Volontairement lente, caviardée de séquences oniriques, l'exploration de l’hôtel de Bodega Bay plonge son spectateur dans l'étrange. Dans cette mécanique pelliculaire, les «puppets» ne seront même qu'un rouage, l'accessoire du suspens et un service d'étage mortel... Le reste est une histoire d'ambiance, de mystère et d'humour noir... Série B parfaitement exécutée et divertissante, film doublement fondateur (pour la saga et pour la nouvelle firme de Charles Band) mais aussi œuvre de transition (entre Empire et Full Moon), Puppet Master est une indispensable pépite du cinéma Bis.

Notes: Les amateurs de jolies Blondes ne manqueront pas de reconnaître une des étoiles de la galaxie "Band", la Belle Barbara Campton (Ré-animator, From Beyond, Castle Freak ) dans tout petit rôle au début de la première bobine.



A l'heure où votre serviteur écrit ces modestes lignes, le premier Puppet Master est toujours inédit en DVD sur le territoire français. Il faut donc se tourner vers nos voisins d'outre Manche pour alimenter nos platines. 88 films en propose des DVD Zone 2 ainsi que des Bluray, qui, même exclusivement anglophones (pas de piste, ni de sous-titres français) pourront intéresser les fans et constituer une alternative à l'import de disques américains. Pendant des années, les éditions vidéos  des trois premiers Puppet Master ont été réalisées à partir d'un transfert hideux et surtout plein cadre. Bonne nouvelle, un nouveau master haute définition nous permet de redécouvrir les films dans un format widescreen avec qualité au poil. La copie laisse même apparaître un appréciable grain cinéma. Une chose est sûre, le film de David Schmoeller n'a jamais été vu dans d'aussi bonnes conditions techniques. Rayon plaisir auditif, on notera la présence d'un mixage Dolby Digital 5.1 et d'une piste Dolbly simple stéréo. Dans le coffre à jouets, pardon à bonus :



- Un commentaire audio de Charles Band
- Un commentaire audio exclusif pour l’Angleterre avec Justin Kerswelle et Calum Waddel
- Une bande annonce originale
- No string Attached, un making of d'env. 7 minutes
- Une introduction de Charles Band (5mn env.)
- 10 bandes annonces de l'univers Full Moon ( Sorority Babes in the Slimeball Bowl-o-rama, Castle Freak, The dead Want women, Gingerdeadman 2, Tourist Trap, Zombies Vs Stripper, The Pit and the pendulum, Skull heads, Meridian, Cannibal Women in the Avocado Jungle of dead)

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