Carnage: Critique et test Bluray




En cette période propice aux offrandes et  aux questionnements existentiels (Que mettre sous le sapin du cinéphile ?) , Rimini Editions livre à nos platines affamées le Carnage de Tony Maylan sous la forme d’un Combo Bluray DVD collector. Une attention délicate et une sortie vidéo, confessons-le, assez inattendue qui valaient bien une chronique tranchante de l’Ecranbis.com


 "Dans un flot de répliques plus ou moins inspirées à Vendredi 13, The Burning, devenu à juste titre Carnage en France, a le mérite d'apparaître comme une copie radicale"

A l’aube des années 80, cinéastes et producteurs marchent dans les pas de Carpenter et Cunningham ou pour l’écrire autrement,  avancent dans le sillon creusé par Halloween et Vendredi 13. A travers ces deux métrages, le  genre Slasher vient de se cristalliser. Si il n’est pas interdit d’en  rechercher les premiers spams  annonciateurs dans les deux décennies précédentes,  voire d’attribuer la qualité d’oeuvre fondatrice  à quelques bobines antérieures, il apparaît, pratiquement comme une évidence, qu’il existe un avant et un après Halloween. Tout comme il existe un avant et après Vendredi 13. Dans un flot de répliques plus ou moins inspirées, The Burning, devenu à juste titre Carnage en France, a le mérite d'apparaître comme une copie radicale de “Friday The 13th”, comprendre assumée, une décalque dont l’analyse conduit de fait, par ricochet,  à analyser l’oeuvre qu’elle prend pour modèle.

"Dans The Burning, la fable va prendre la tournure d’un bowling humain  et d’une série de mises à mort méthodiques permettant à Tom Savini d’exercer son talent"
 
Ainsi, Carnage structure son propos autour de concept et d’éléments formels propres au genre. L’image du croquemitaine pour commencer, ici un grand brûlé annonçant presque le Freddy Krueger de Nightmare on Elm Street et dont le nom renvoie en douce à une véritable légende urbaine. Un personnage de fable, mais de fable à la morale contrariée. Puisque dans “Carnage”,le bourreau d’aujourd’hui est la victime d’hier. Cette métamorphose, cette redistribution des rôles est justifié e de façon rationnelle  (par une ”simple” relation de cause à effet , par la quête d’un apaisement passant par la vengeance donc par un processus d’autojustice ), mais  elle s’opère dans le même temps de manière irrationnelle et déstructurée.  Le revanche du croquemitaine de “The burning “s’exerce sur  une poignée  d’adolescents qui à l’exception d’un des  personnage (Todd), ne lui ont rien fait…


Le propos de Carnage décortiqué, le tueur et le mobile extraits de ses entrailles, il reste à parler de la victime et du mode opératoir. Et bien au delà  des frontières du slasher, la victime toute désignée du cinéma horrifique américain reste cet être en voyage entre l’enfance et l'âge d’adulte. L’ Adolescent…. qu’il prend de manière factuelle comme propos et de manière tout aussi factuelle comme public cible. Dans “The Burning” comme dans Vendredi 13, la fable va prendre la tournure d’un bowling humain , et d’une série de mises à mort méthodiques permettant à Tom Savini d’exercer son talent mais également de vérifier quelques règles propres à ce type de cinéma.  Des codes souvent examinés à travers le prisme de la morale et de la leçon …accrochés à l’idée que les actes et les choix  des personnages (relations sexuelles, ballade solitaire et aventureuse...) devront se payer au prix du sang. Dans un angle de vision plus psychanalytique, le Slasher est au fond un genre qui se refuse à  faire la différence entre la pulsion de vie et la pulsion de mort. 

Carnage est un film imparfait, ostensiblement initiatique pour son cast, son équipe et ses producteurs. Mais paradoxalement, c’est aussi un film qui fonctionne..."


Le jet de  Maylan s'émancipe toutefois de son modèle (Vendredi 13) pour en choisir un autre dans une séquence introductive en deux temps.  La  jungle urbaine et crasseuse remplace momentanément un décors de colonie  à la MeatBalls. L’esthétique de la séquence évoque immanquablement le “Maniac” de Lustig. Cette entorse quelque peu forcée du scénario apparaît comme gratuite ou pour l’écrire autrement, tombe comme un cheveu sur la soupe. Mais elle a le mérite de nous donner une idée la véritable nature du spectacle proposé. Un recyclage de formules et de figures peinant un peu à trouver justification. Pour le dire avec humour, Harvey Weinstein a surtout eu l’idée originale de reprendre celle des autres et le travail de quatre autres auteurs n’a pas réussi à le cacher. Confessons-le, sur bien des points , l’écriture donc mais également la direction d’acteur, le montage (portant la griffe d’un Jack Sholder débutant), “Carnage” est un film imparfait, ostensiblement initiatique pour son cast, son équipe et ses producteurs. Paradoxalement, c’est aussi un film qui fonctionne par la force de ses effets sanglants, son score délicieusement électronique,  une facture très 80’s mais également par sa qualité historique de “réplique” à Vendredi 13.  



Un œil sur le disque:


Les éditions Rimini livrent une coffret digipack deux disques  avec fourreau  particulièrement soignée. Le master haute définition est définitivement engageant, présente le film dans son Flat (1.85) d’origine, s’accompagne de pistes françaises (doublage d’origine) et anglaises… mais également d’une série de Bonus, certes pas forcément très informatifs mais néanmoins intéressant. Un petit livret signé par Marc Toullec permet d’en apprendre un peu plus sur la genèse du film. Bref l’ édition est  recommandable.